Les Archers (2005)
L’aspect relationnel fut très important avec la collaboration des archers. Contrairement à la photographie de sport, la prise de vue se fit à une distance plus courte que celle utilisée par les photographes de sport. Je n’étais pas armée d’un zoom mais je me plaçai à proximité des archers sur leur pas de tir.

Que vais-je trouver dans leur action, le tir ? C’est à la fin des séances que je trouvais intéressant de saisir photographiquement le geste au moment de la décoche, quand l’archer immobile, tous muscles tendus, décide de lâcher la tension. Le geste de la main devient important à ce moment, la direction de la flèche dépend de ce dernier mouvement du corps.

Dans cette série photographique, il s’agissait d’associer les diverses décoches pour remarquer les différentes formes que la main et l’expression du visage peuvent exercer au lâcher. La prise de vue a lieu lorsque l’archer est libéré de toute sa tension et exprime alors un instant de relâchement.

Dans ce travail, j’ai réuni des archers disposés sur deux lignes verticales. Ensemble, ils dégagent une puissance dans un moment incertain, celui bien sûr de la décoche, avant même de savoir si la flèche a atteint le centre de la cible.

Certaines images sont floues, ou bien, seule la main est indistincte. Je ne recherche pas à montrer la précision du geste mais à dégager l’expression paradoxale du visage qui contraste à certains moments avec la forme de la main qui semble figée. Je voulais toucher cette frontière entre un moment de concentration jusqu’à la libération du geste.

Lors de la prise de vue, la suspension du geste d’un sportif est imprévisible mais dans chaque domaine sportif, la position du corps est d’une parfaite précision qui laisse percevoir une esthétique dans la gestuelle.

Les personnes sont photographiées hors de leur contexte ainsi l’aspect gestuel est accentué, ce qui donne un aspect troublant à la scène. Le mouvement du sportif est gelé, le tournoi ne compte plus, l’arrêt sur image laisse apparaître des gestes esthétiques.

Les archers ont été photographiés pendant leur séance d’entraînement et je me suis focalisée sur le geste de la décoche qui est différent d’un archer à un autre. Bien que l’idée de la décoche soit universelle, la perception et la pratique du geste restent singulières et l’identité du tireur est affirmée. J’ai gardé le même cadrage, le plus serré possible de la personne pour ne voir que son profil et le geste presque chorégraphique de la main, celle qui lâche la corde.